mercredi 7 juillet 2010

L'âge des fantômes



Voici que j'arrive à un âge où il est possible que les jeunes adultes que je croise soient les enfants de mes contemporains. Je pourrais être leur père.

Au-delà du frisson existentiel que cet avènement provoque le long de mes pauvres vertèbres écrasées, il m'est soudainement apparu comme une réalité, jeudi dernier sur le trottoir du boulevard Saint-Jacques, lorsque je croisai une jeune femme que j'ai failli interpeller, tant elle ressemblait à une autre jeune femme que je connais.

Ou plutôt que j'ai connue légèrement il y a vingt-cinq ans.

Bon. Nous ne sommes pas dans Obsession de Brian DePalma (où le héros, je le rappelle, rencontre "par hasard", dans l'église de San Miniato, à Florence, le sosie de son épouse, morte tragiquement quelques vingt années plus tôt), ou, bien sûr, dans Vertigo (je ne vous raconte pas).

Mais quand même. Si tout, chez Hitchcock (ou Boileau et Narcejac) était parti de là ?

Il y avait aussi cette publicité assez fascinante pour Le comptoir de cotonniers, ou des mères et des filles (très chics) posaient ensemble sur la même photo. La ressemblance entre une fille et sa mère a quelque chose d'effrayant, de plus effrayant que celle entre un père et son fils, peut-être parce que cette dernière a quelque chose de rassurant : elle éteint le doute éternel que serait, paraît-il, la paternité.

Et la jeune femme sur le trottoir, me direz-vous, qu'est-elle devenue ? Lui avez-vous parlé ? Est-elle bien la fille de sa mère, si j'ose dire ?

Je l'ignore. Je ne lui ai pas parlé.

Je préfère les fantômes, sans doute.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci, c'est gentil.

Unholy Ghost

Anonyme a dit…

Madeleine de Proust/Marker/Hitchcock... Déjà vue.

U.G.