samedi 6 novembre 2010

La nuit et la nuit


Les éditions Makam viennent de sortir une édition « collector » de Le jour et la nuit, le film de fiction réalisé par Bernard-Henri Lévy en 1997. 


Disons-le sans agressivité : treize ans plus tard, tout amateur de cinéma peut continuer à constater l’étendue du désastre du simple point de vue de la fabrication : pas de cadre, pas de direction d’acteurs (Delon-Dombasle), un montage à la truelle, un enfilage de clichés sur la mort, la création, le Mexique ou les montgolfières. Jamais l’œil ou l’intérêt ne s’attache à rien. 


Alors peu importe au fond que le film ait été hué au festival de Berlin par la presse internationale (qui se fichait bien de savoir qui est B. H. Lévy), qu’il ait été un échec à sa sortie, que BH Lévy ait tenté de le survendre avec l’aide de son réseau d’amis chefs de presse, et que le même BH Lévy se soit cassé la figure en tentant de sauter par-dessus la critique (en ne lui montrant pas le film). Avec le recul, on peut juste dire qu’un réalisateur a raté un film. Mais des films ratés, nous en voyons tous les jours. On pensait donc l’affaire classée.

Or voici que le film sort en DVD accompagné en bonus d’un documentaire très pompeux, réalisé et produit par les éditeurs du DVD, Caroline Mathieu et Thierry Humbert. 
Autopsie d’un massacre tend à démontrer, témoignages à l’appui (souvent gênés), que Bernard-Henri Levy  fut victime d’une cabale de la critique française, surexcitée à la simple idée de démonter non pas son film, mais BHL. Et jaillit ainsi, par hasard, l’idée saugrenue que ce navet serait non seulement un chef d’œuvre en avance sur son temps, mais aussi un « film culte »  - c’est l’inénarrable Yann Moix qui se gargarise de ce terme abusé, l’appliquant au passage à sa choucroute Cinémane, elle-même encensée par BH Lévy à sa sortie…. 


A ce bal de tartuffes, d’imbéciles et de conjurés, on ne sait plus trop quoi répondre. Sinon rappeler qu’être l’objet d’un culte, pour un film, ne le préserve en rien de sa médiocrité (The Rocky Horror Picture Show ou les films d’Ed Wood sont aussi des films-culte).




 (article publié dans le numéro 779 des Inrockuptibles, le 3 novembre 2010)

2 commentaires:

Dr Orlof a dit…

Je vous trouve bien sévère pour "the rocky horror picture show" que je ne trouve pas si mal au-delà de son statut de film culte. Et les films d'Ed Wood (médiocres, je le concède) sont quand même beaucoup plus drôle que l'infâme bouse de BHL.
L'article est très bien vu.

Anonyme a dit…

Ce qui sauve The Rocky Horror et Ed Wood de la médiocrité c'est l'absence d'esprit de sérieux d'un côté et la croyance poétique dans le cinéma de l'autre. Choses dont est dépourvu le "film" de BHL.

UG