dimanche 18 avril 2010

Petit éloge de l'ignorance



"Il faut avoir le courage de choisir ses ignorances", disait André Gide, je crois.

Par exemple, j'ai réussi à ce jour, par principe, à ne jamais voir un seul film d'Andrei Tarkovski. Volontairement. Je les ai tous en DVD, je n'en ai jamais ouvert aucun.

Il y a un nom de lieu qui m'a toujours fasciné, qu'on croise souvent : Cerisy-la-salle. Les colloques de Cerisy-la-salle. Foucault, Lacan, Artaud, Sade, etc. 

Je ne sais pas où ça se situe, et je ne veux pas le savoir.

J'imagine très bien l'endroit : des grandes salles dessinées par Le Corbusier ou Oscar Niemayer, le tout plongé au milieu d'une clairière. Le béton moussu, les graviers devant l'entrée, un peu de rouille. Et puis des cerisiers devant les salles de réunion aux immense baies vitrées et au plafond bas, bien sûr.




Un jour, en revenant en train de la Sarthe, je crois, une bande de joyeux et vieux barbus est montée massivement à un arrêt. Des physiciens, à les entendre. Ils revenaient d'un colloque avec des paniers pleins de cerises. 

Je crois que Cerisy-la-salle se trouve par là, un peu cachée des regards.

Je pourrais vérifier rapidement dans un atlas, sur Google, vous pourriez m'expliquer, mais je ne veux pas le savoir. Non, je préfère mon Cerisy-la-salle au vrai.

A une plus grande échelle, je connais très très bien le Brésil sans y être allé et je n'en ai nullement l'intention.

J'aime l'exotisme, le folklore. Mon Brésil est ridicule mais je l'aime.

J'aime le Paris des films hollywoodiens des années 50. Tout y est faux mais c'est assez attirant, comme lieu, ce Paris-là. On aimerait s'y trouver.

J'aime l'Europe de Lubitsch, l'Italie de Fellini, l'Espagne de Bunuel, l'Amérique d'Hitchcock, l'Inde de Lang.

Qu'importe l'horrible réalité.

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