Je ne sais pas pourquoi je pense à cela. Je suis à Cannes pour suivre le festival.
Il y a quelques semaines, j’étais parti en vacances sans avoir eu le temps de terminer un article.
Je l’ai donc achevé sur mon lieu de vacances, dans une résidence secondaire à la campagne que j’aime beaucoup et que je connais bien.
Pendant presque deux jours, je suis resté enfermé dans ma chambre, allongé sur mon lit avec mon ordinateur, mes notes et les DVD des films du réalisateur dont je devais écrire le portrait.
J’y ai pris, je dois le dire, beaucoup de plaisir (avec toujours cette petite angoisse d’oublier l’essentiel et de se perdre dans le secondaire, qui assombrit tout ce que je fais). J’avais utilisé deux jours de congés payés pour travailler mais j’étais assez content du résultat.
Mais j’ai une famille, une épouse, des enfants. Je ne me suis pas beaucoup occupé d’eux, en dehors des heures de repas et des soirées pendant ces deux journées.
Je ne veux pourtant pas ici parler de culpabilité, ce n’est en tout cas pas le sujet que je désire aborder.
Accomplir un travail dont on est content, dont on pense qu’il n’est pas totalement inutile, stupide, inintéressant, est valorisant (je dis cela aujourd’hui, je ne l’ai pas toujours pensé).
C’est juste que je ne comprends pas très bien comment nous répartissons notre temps de vie et j’ai le sentiment partagé avec certains de mes amis de ne pas réussir à tout rationaliser, à compartimenter correctement le temps et les choses pour que tout s’emboîte. On fait ce qu'on peut. Mais ce n'est pas seulement ça.
Mon beau soucis, ici, ce sont les enfants. Que doit-on donner à ses enfants ? De quoi ont-ils besoin ? Que nous demandent-ils au fond ? De les rassurer ? De leur montrer qu’il est possible, avec de la chance, d’avoir une vie pas trop horrible tout le temps (je respire la joie, là, je le sens) ?
Ce temps que j’ai consacré avec un certain bonheur à une tâche qui me comblait tout en en la considérant comme un devoir, le leur ai-je retiré ou le leur ai-je pris ? Je crois hélas que l'équilibre des enfants dépend de celui de leurs parents. Mais je n’ai pas l’illusion qu’elle leur suffise non plus. C'est comme l'amour. C'est bien l'amour, mais bon, c'est un peu facile parfois, d'aimer, aussi.
Mes enfants ne m’ont rien reproché, je ne souffre pas réellement, ce serait exagéré de dire que je regrette de n'avoir pas consacré plus de temps à eux pendant ces deux jours. Je ne crois pas que le bonheur familial consiste à se trouver en permanence les uns avec les autres.
Je me demande juste comment employer au mieux le temps ici et maintenant. Quitte à le disperser et à le jeter par les fenêtres, d’ailleurs, le temps, s’il le faut.
Voilà. Je suis à Cannes pour le festival de cinéma.
4 commentaires:
ouch !!!
je venais lire quelque chose sur le festival, et je trouve un écho à mes interrogations actuelles de parent, ça me fait un drôle d'effet !!!
bon festival Jean-Baptiste !
Delphine R (ancienne collègue à la vidéothèque actu, il y a fort longtemps... 1993 je crois)
Robillard ?
oui :-)
je te lis régulièrement avec plaisir dans les Inrocks
J'espère que tu vas bien, dis donc. Plus d'évanouissements intempestifs, j'espère aussi.
Merci, ça me fait très plaisir, tu sais.
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